
Parole d’Evangelle. Un texte au croisement du récit, du monologue théâtral et du poème sur Lilith, avec pour thème la domination masculine archaïque et le dogme de la religion. Izanne
Dans une transe poétique, le démon nocturne s’exprime au grand jour.
Chroniques de lecture
Le tableau pourrait faire une belle image pieuse. Une jeune baby-sitter penchée sur un « joli petit bébé / dans son pyjama bleu. ».Douceur maternelle et rassurante. Mais Macha n’est ni Marie ni même Eve. Le masque se lève, comme sur la sublime photo de couverture d’Olivia HB, sous l’effet d’un souffle des origines, celui de l’arché-femme : Lilith, à qui la tradition biblique – ou pire, la morale- a usurpé la suprême place . Pas le lait qui coule ici mais le venin. Pas la berceuse mais l’imprécation et l’intranquillité qui maintiennent en éveil ou en cauchemar : « Je promets démons et merveilles ». Lilith chante la Chute de l’homme au petit « h »,honteux, hébété, humilié . Adam vient de la terre, Lilith l’y renvoie : « Je suis le destin / auquel ils essaient d’échapper. » Il n’est plus le temps de bercer, surtout d’illusions, ce petit homme ensommeillé et en devenir. La poésie syncrétique et féministe de « Parole d’Evangelle »(on pense à l’inspiration androgynique d’un Lautréamont) réveille en démone notre féminité importunée. (David Le Golvan)
« J’ai eu envie de donner la parole à Lilith, première compagne d’Adam, abordant à travers elle le thème universel de la condition de la femme dans le monde. Je la laisse raconter son histoire et donner sa version des faits ». Izanne
Personnages :
Macha : babysitter, Lilith
Macha a été engagée pour être la babysitter d’un couple. Elle se retrouve seule avec le bébé. La nuit tombe. Lilith va prendre la parole à travers Macha. Et si c’était Lilith elle-même ? Quoi qu’il en soit, Lilith va régler ses comptes avec l’humanité…
Extraits :
Vous mes sœurs à qui l’on a coupé la langue et bien plus encore et quoi de pire ? la parole ! La parole d’évangelle. Entendez, je porte la parole d’évangelle. Ma salive est la sève des meurtrissures. Ma voix est la litanie des trahisons. Je suis l’ode des insoumises.
Qui est donc Lilith, cette figure féminine qui dans la tradition juive est réputée
avoir été la première compagne d’Adam ?
En partie oubliée par l’histoire et les textes d’exégèses issus de la chrétienté, Lilith prit une place sporadique et trouble dans les différents systèmes de croyances judéo-chrétiens portés sur la Femme et sa sexualité. Cette démone est au carrefour de plusieurs religions et demeure, semble-t-il, la figure féminine qui témoigne le plus universellement des craintes, préjugés et désirs portés sur la Femme et ses mystères supposés. On la retrouve au centre de plusieurs mythes hérités de populations diverses, ce qui pourrait témoigner d’une structure unitaire du penser humain concernant le féminin. Les récits hébraïques et juifs la présentèrent sous l’aspect d’une démone aux attributs masculins et dévorateurs. Malgré cette présence dans la littérature juive, on ne la trouve guère présente dans les écrits de la chrétienté antérieurs au XVIe siècle, si ce n’est dans un texte de saint Augustin qui la déclare être une illusion de l’esprit. Les versions de la Bible et conceptions chrétiennes ne gardèrent pour figure centrale du mythe de la création qu’une seule femme : l’Ève que nous connaissons. Selon les croyances, Lilith fut remplacée par cette femme plus sage. Il faut attendre la Renaissance pour trouver le nom de Lilith dans les écrits chrétiens. Son caractère androgyne la place au centre de tous les mythes qui traitent de la sexualité, de l’amour, de la distinction des sexes, de la question des origines, du pouvoir et de la force la plus obscure de l’humain : son animalité.
Who is Lilith, this feminine figure who, according to Jewish tradition, is supposed
to have been Adam’s first companion ?
More or less forgotten by history and Christian exegetical texts, Lilith holds a sporadic and somewhat vague position in the various Judeo-Christian belief systems related to women and feminine sexuality. This demon is at the crossroads of several religions and seems to be the feminine figure that most universally represents the fears, prejudices and desires directed towards women and their supposed mysteries. She appears at the center of several myths that have come down from populations as diverse as they are distinct, which could suggest a certain universalism in the structure of human thought concerning the feminine. Lilith came into existence in the form of Hebraic and Jewish accounts, being presented in Talmudic and Midrashic literatures as a devouring female demon with masculine traits. Despite this presence in Jewish literature, she is barely present in Christian writings before the 16th century, with one notable exception in a text by Saint Augustine, who declares her to be an illusion of the mind. The various versions of the Bible and Christian conceptions retained only one woman in the central myth of the creation: Eve. According to some beliefs, Lilith was replaced by this more well behaved woman. It is not until the Renaissance that one finds the name Lilith in Christian writings. Lilith’s androgynous character places her at the center of all myths that deal with sexuality, love, the distinction between the sexes, the question of origins, power and the most obscure force in humanity: its animal nature.
Quien es Lilith, esta figura femenina que en la tradición judía es supuestamente la
primera compañera de Adán ?
En parte olvidada por la historia y los textos de exégesis originarios de la cristiandad, Lilith toma un lugar esporádico y poco claro en los diferentes sistemas de creencias judeo-cristianas sobre la Mujer y su sexualidad. Este demonio está en la encrucijada de varias religiones, y permanece aparentemente como la figura femenina que testimonia el más universal de los temores, prejuicios y deseos sobre la Mujer y sus supuestos misterios. Se la encuentra en el centro de muchos mitos heredados de poblaciones diversas, lo que podría testimoniar la existencia de una estructura unitaria del pensamiento humano relativo a lo femenino. Los relatos hebraicos y judíos, la presentan bajo el aspecto de un demonio de atributos masculinos y devoradores en las literaturas talmúdicas y midráquicas. Aunque presente en la literatura judía, no se la encuentra presente en los escritos de la cristiandad anteriores al siglo XVI, excepto en un texto de San Agustín, que la declara una ilusión del espíritu. Las versiones de la Biblia y las concepciones cristianas conservaron como figura central del mito de la creación a una sola mujer: la Eva que nosotros conocemos. Según las creencias, Lilith fue reemplazada por esta mujer más prudente. Hay que esperar al Renacimiento para encontrar el nombre de Lilith en los escritos cristianos. Su carácter andrógino la ubica en el centro de todos los mitos que tratan sobre la sexualidad, el amor, la distinción de los sexos, la cuestión de los orígenes, del poder y de la fuerza más oscura del ser humano: su animalidad.
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